Le lancement fin 2020 des réseaux de cinquième génération ouvre la voie à des services innovants dans les domaines du cloud gaming ou de l’usine du futur. La montée en puissance de la 5G sera toutefois progressive et les opérateurs télécoms devront convaincre les indécis.
Cette année, les opérateurs télécoms ont fêté Noël dignement. Quelques semaines avant la date fatidique, ils ont pu (enfin) ouvrir leurs réseaux 5G. La crise sanitaire qui a retardé la mise aux enchères de la première bande de fréquences par l’Arcep, l’autorité de régulation des télécoms, a brouillé jusqu’au bout leur calendrier.
La pandémie n’est pas le seul élément perturbateur. En France, un débat public a été lancé sur l’opportunité ou non de recourir au nouveau standard de la téléphonie mobile. Des voix s’inquiètent notamment sur le risque que ferait peser les ondes électromagnétiques sur notre santé. En avril, un rapport de l’ANFR, le « gendarme des fréquences » avait conclu à leur non-nocivité sur le segment de fréquences 3,4 – 3,8 GHz attribué par l’Arcep.
De grandes villes comme Lille, Paris ou Nantes ont néanmoins décrété un moratoire, le temps de lancer un débat public ou d’attendre la publication d’un nouveau rapport prévue au printemps 2021 et émanant cette fois de l’Agence nationale de sécurité sanitaire (Anses). Certaines voix s’alarment aussi sur l’impact environnemental de la 5G sur la base de l’avis du Haut conseil pour le climat qui redoute une explosion du nombre d’objets connectés.
Pour convaincre les indécis, les opérateurs télécoms devront rappeler les atouts de la 5G qui promet, à terme, des débits théoriques multipliés par dix tout pour un temps de latence proche de la milliseconde. Des prouesses techniques qui ouvrent la voie à des cas d’usage disruptifs dans le domaine de l’usine du futur, du cloud gaming ou des expériences immersives de réalité virtuelle et augmentée.
Au niveau sociétal, la 5G permettra de lutter contre les déserts médicaux avec le développement de la télémédecine. La nouvelle norme accompagnera la transition écologique en fluidifiant la circulation avec l’avènement du bus puis de la voiture autonome. La 5G dopera aussi le concept de smart city pour aller vers une gestion plus efficience des ressources énergétiques des bâtiments, du mobilier urbain ou de l’éclairage public sur un territoire.
Des usages disruptifs à partir de 2023
Comme pour la 4G, la montée en puissance de la 5G sera progressive. Lors de la phase dite « non-standalone », entre 2021 et 2023, le nouveau standard continuera à fonctionner sur un cœur de réseau 4G. Durant cette phase transitoire, l’arrivée de la 5G servira avant tout à densifier le réseau, les fréquences 4G étant arrivées à saturation.
Il faudra attendre l’arrivée de la 5G « standalone » pour que celle-ci donne toute sa puissance. D’ici là, les opérateurs télécoms auront fait évoluer leur cœur de réseau. Reposant essentiellement sur des équipements hardware proposés par les équipementiers Nokia, Ericsson et Huawei, il sera demain « cloudifié ».
Cette virtualisation permettra notamment aux opérateurs de faire du network slicing. C’est-à-dire « découper » un réseau en tranches afin de garantir une qualité de service de bout en bout et une sécurité optimale pour des cas d’usage critiques comme la couverture d’un site industriel.
Les entreprises devraient alors être les grandes gagnantes des avancées de la 5G si l’on en croit les expérimentations en cours sur les sites pilotes recensées par l’Arcep. Associée à l’intelligence artificielle, elle généralisera la maintenance prédictive et le contrôle qualité par computer vision dans l’industrie, ou la traçabilité des containers en logistique. Pour séduire les professionnels, les opérateurs télécoms devront s’appuyer sur un réseau de partenaires, ESN et intégrateurs.
Dans le domaine grand public, la plupart des cas d’usage se dessinent autour des médias et du divertissement avec la possibilité de jouer aux jeux vidéo en ligne et sans effet de latence, de regarder films et série en streaming en très haute définition (4K/8K) ou de les télécharger en quelques secondes depuis son terminal mobile.
C’est en mettant en avant ces services innovants que les opérateurs télécoms arriveront à convaincre les particuliers de payer un peu plus cher leur abonnement. Ce qu’ils n’avaient que partiellement réussi à faire lors du passage à la 4G. Des box 5G devraient être également commercialisées afin de pallier l’absence de la fibre dans les zones grises ou blanches. Par ailleurs, les opérateurs devraient profiter du renouvellement accru des smartphones pour s’équiper en terminaux compatibles 5G.
Dans les mois à venir, ce sujet de la monétisation sera crucial pour les opérateurs télécoms. Au-delà du remboursement des fréquences attribuées – 2,8 milliards d’euros en cumulé – ils continuent à déployer sur tout le territoire la fibre mais aussi la 4G, avant que la 5G ne prenne le relais. Une véritable montagne d’investissements se dresse devant eux.
En attendant la… 6G, déjà sur les starting-blocks, on prête au futur standard de la communication mobile des débits supérieurs à 1 000 gigabits par seconde. S’il n’arrivera que vers 2030, les grandes manœuvres ont commencé. La Chine a lancé un satellite expérimental dédié et Hexa-X, une initiative européenne réunissant Atos, Orange, Ericsson ou Nokia, a été annoncée début décembre.